En République démocratique du Congo (RDC), l’Observatoire de la dépense publique (Odep), une ONG congolaise, s’inquiète du manque d’amélioration dans la gouvernance depuis l’alternance à la tête de l’Etat. Félix Tshisekedi, a succédé à Joseph Kabila, mais la mauvaise gouvernance des finances publiques « demeure et empire » au mépris de l’éradication de la pauvreté et du développement social, affirme l’ONG. Elle a publié hier, vendredi, à Kinshasa son rapport sur l’exécution des lois de finances entre 2017 et 2019.
avec notre correspondant à Kinshasa, Pascal Mulegwa
Le niveau des dépenses des secteurs sociaux est resté très faible, pointe l’Odep. C’est le cas de la santé avec à peine 1,1 milliard $, soit 6,7% du budget général de ces trois années.
Dans la même période, le rapport de l’ONG relève le non respect des textes ou la passation chaotique des marchés publics car 124 demandes d’autorisations spéciales de passation des marchés de « gré à gré » pour une valeur de 1 294 731 823 USD ont été accordées en 2019 sur quelque 215 sollicitées. Entre 2017 et 2019, l’Odep dit avoir tracé 19 cas de « grande corruption non contrôlés par les organes de contrôle de l’Etat et voir même par la Justice ». Ce qui représente, selon cette ONG, un manque à gagner d’environ 12,1 milliards USD.
Les travers des années Kabila n’ont pas été rectifiés sous la présidence de Félix Tshisekedi, selon le rapport de l’ONG dont Florimond Muteba est le président du conseil d’administration. « La même négligence a accompagné tous les deux régimes : plus de moyens pour les institutions et moins de moyens pour les secteurs pauvres et une exécution minable, parce que quand on donne 3 % à l’agriculture, c’est à peine 0,8 % d’exécution », relève Florimond Muteba.
Pour ce qui est des recettes, l’Etat est resté dépendant de l’extérieur, seuls 3 milliards sont mobilisés par an et les dépassements des dépenses des institutions et ministères sont légion.
Pour l’ODEP, la présidence de la République et la primature sont restées « en tête des institutions budgétivores ». Florimond Muteba insiste : « Il faut changer de cap, mais il n’y a aucun signe qui nous montre qu’il peut y avoir une volonté politique pour changer de cap, le problème c’est que le mauvais exemple vient d’en haut ».
Ce qui irrite les proches du président Tshisekedi, très mobilisés sur la présidentielle censée se tenir en 2023, c’est surtout cette recommandation de l’ONG à la population de « tirer les conséquences de la non prise en compte de manière effective des besoins sociaux dans l’exécution des budgets de l’Etat pour 2017-2019 et d’exiger des comptes aux dirigeants actuels avant tout renouvellement des mandats » et de « poser, lors des élections à venir un vote capable d’amener le pays vers un changement vivement souhaité par tout le monde ».
En réaction, un proche conseiller du président relève par que depuis la fin de la coalition entre Kabila et Tshisekedi, la situation s’est nettement améliorée. Et qu’il serait juste de juger le président à partir de l’an 2021, le troisième de son quinquennat.
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